lundi 7 mai 2018

haíti,l''ile a vache/ Mai 18



10H 30 Mardi 24 Avril 2018,St Martin : quelques petits tours auprès des bateaux connus pour dire au revoir , bonne nav' et cap sur Haïti, précisément l'ile à vache

On longera par le sud Ste Croix, Porto Rico et la république Dominicaine.
la lune est là, fidèle, au rendez vous du coucher du soleil ,grossissant chaque jour un peu plus  et nous accompagne jusqu'à 3h du mat'.Nous ne sommes pas seuls sur l'eau, parfois un oiseau vient se reposer sur le panneau solaire, se déchargeant des fientes de la semaine. Les noces triomphales de la lune et l'océan projettent une nappe éblouissante ponctuées de petites crêtes d'écume
Aucun voilier aperçus, quelques cargos nous croisent que je ramasse dans le viseur du compas de relèvement, le temps de discerner leur direction et parfois leur vitesse.

 A la VHF aucun ne répondra malgré nos demandes de météo ,par contre un après midi, un avion genre foker passe suffisamment près de Ré'vad pour que je leur fasse des coucous de la main que l'avion a dû prendre pour un appel de détresse :dans mon élan, j’avais oublié que seule une main balayant le ciel indique "tout va bien" mais que les 2 bras se croisant dans un élan fraternel vers le ciel signifie, "y a un problème," l'avion a contourné par 3 fois le bateau, virant sur son aile en se penchant et moi m'enthousiasmant de ce regain d'intérêt ,je réitérai mes gestes désordonnés ! .

Enfin après 640 Miles , 6 nuits et 6 jours de navigation, avec un vent portant de 10 à 20 nœuds, sous génois tangonné, 3 ris à la grand voile, juste pour le stabiliser ou geenaker seul ,nous atteignons l'ile à vache ,petite ile de 14 kms d'Est en Ouest au sud d'Haïti.

















Arrivée à 7H30 à Caille Coq, petit village aux maisons de couleurs, dont les murs festonnés de grosses pierres blanches et rondes provenant des falaises de l’ile forment l’appareil architectural .
Oups 2 voiliers seulement sur ancre dans la baie. C’est ok pour nous, un nous suffisait pour nous rassurer sur la tranquillité du lieu.On jette la pioche.



bateau pays




1 , 2 puis 4 et 5 « bois fouillés » pirogues en bois taillés dans du manguier entourent Ré’vad, ca cogne un peu partout sur la coque en alu, mais bon, c’est solide l’alu, ça encaisse bien..Chaque enfant ou ado proposent leurs services : nous accompagner au marché, frotter l’inox, nettoyer la coque, faire des lessives, remplir des bouteilles d’eau ou vendre des mangues, bananes, les plus grands ou les adultes demandent si l’on a pas des voiles, des bouts, des hameçons..on a tout ça sauf des voiles et l’on troquera, donnera, échangera avec eux
Ici on paye soit en $ US ou ou gourdes. En 2018 1 € = 60 gourdes

Avant de partir, nous avions demandé au shipchandler de St martin coté français, ce qu’il voulait bien  donner à Haïti : on a récolté des pots de peinture bi composantes, des casquettes et en faisant le tour des voiliers, certains nous ont donné pour eux, des cahiers, stylos, feutres, habits pour enfants, cirés complets, échantillons de crèmes, dentifrices, savons etc plus ce que nous avions mis de coté qui étaient en double sur le bateau type garcettes, bouts, fil de nylon, hameçons, livres, masques et tubas, casquettes…et on a fait du potlatch : Echanger des fruits contre du matériel, des langoustes contre des cirés, donné les bouquins et crayons à l’école , filé la peinture et cirés à l’association des pêcheurs, bref on a bien allégé le bateau .

le troc



Le soir ,le village vit au son des dominos frappés lourdement sur les tables en bois, on a mouillé assez pres des maisons en rivage et on  entend du bateau , des rires  et éclats de voix des hommes que domine parfois la musique  diffusée par la radio.
Ici sur l'ile à vache pas de route mais des chemins qu'empruntent les insulaires et les ânes chevauchés en amazone  par les enfants avec une grosse caisse accrochée à  un des bas flanc et supportant soit des sacs de riz, soit du charbon de bois .Les jeunes adultes circulent sur des 125 rafistolées mais solides vu le traitement qu'ils font subir parfois à 4 sur le siège .
Il n'y a pas d'électricité ,la plupart ont des  lampes à pétrole et les plus nantis un panneau solaire .

Pour nous, un village sans routes, sans voitures ,sans néons le soir représente un havre de paix, voire de l'exotisme .Ceux qui y vivent ont sans doute d'autres aspirations. Les jeunes ont les mêmes rêves que n’importe quel jeune connecté dans le monde : voyager, avoir un Iphone dernière génération, un bon job qui rapporte, des belles fringues:
 L’aéroport sera construit d’ici 1 an ainsi que la nouvelle route qui reliera Caille Coq au village de Madame Bernard et à l'aéroport. Certains espèrent une qualité de vie meilleure grâce aux tourisme, encore faut il avoir assez d’argent pour proposer un service type pick up pour amener les touristes de l’aéroport aux hôtels, d’autres semblent désabusés, voire fatalistes..A combien d’habitants cela profitera vraiment ?Tout changement est suspect. Les jeunes adultes veulent mettre de coté des $ pour partir au Chili y travailler et subvenir aux besoins de la famille, construire une maison solide.

Entre temps nous profitons de l’offre d’Antoine Denest pour nous emmener à bord de sa moto 125 de marque chinoise à 3 dessus sans casque ni permis, ni assurance pour faire la visite vers la nouvelle route qui se construit et qui reliera Caille Coq au village de Madame Bernard  vers l’aéroport.la « route » est encore un chemin raviné par endroit ,mais élargi par les bulldozers tout neufs .Antoine conduit bien et prudemment. On ne sera jamais éjectés de la moto.

 La campagne est belle, les arbres sont chargés de fruits , on croise des regards parfois souriants, parfois très fermés ,souvent scrutateurs, et on évite de prendre des photos sans leur permission, certains refuseront, probablement par dignité : ne pas filmer la misère
Ne faisons pas d’angélisme même si les habitants de l'ile à vache sont gentils, avec nos voiliers qui ne servent qu'a la plaisance, et en plus avec tout ce que nous avons amené, nous représentons l'opulence, l'abondance de biens de consommation dont il leur semble naturel qu'on leur fasse profiter.
A leur place, nous réagirions probablement de même.
 La confrontation avec nos modes de vie leur renvoie en boomerang leur propre dénuement. Ils vivent avec très peu de moyens et ont besoin de tout matériel : pêche, cordage, bouts, garcettes, nylon, hameçon, peinture, masques et tubas..

Un petit mot sur la clearance. Si vous restez plus d'une semaine, et que vous voulez être en règle avec l’immigration , un conseil : Aller directement vous-même au village "Les Cayes" de l'autre coté sur le continent: des barques à moteur font régulièrement la navette, mais vous n'avez rien à payer sur l'ile même. Si vous posez la question de la clearance on vous amènera direct chez faux "capitaine du port" au bon bagout et sans légitimité aucune qui empochera vos 10 € + bakchich en vous refilant un papier bidon en faisant croire que comme ça vous êtes en règle ! Il a travaillé autrefois pour l’immigration mais c'est terminé depuis un bon paquet d’années, malgré cela il continue son petit business pour les crédules. 



Voilà, de l’le à vache en Haïti , nous gardons un souvenir assez ému, nous nous sommes posés beaucoup  de questions sur l’attitude à adopter, comment donner sans froisser, sans assister…
Troquer, échanger a permis un autre regard parfois, mais on a la plupart  du temps bricolé avec notre conscience.

Merci au magasin d’accastillage « ile Marine » de st Martín pour les dons de pots de peinture et casquettes
Merci à Catherine et René du voilier Trisbal IO,
À Gérard et Cathy du voilier Vulcain »Cyrano »
À Philippe et Nicole d’Odysséa 
À Pascal et Lorraine du Tokay « Ré’vad :-]
Pour tout ce qu’ils ont filé

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Un des menuisiers du village.Tout est fait a la main: tenons mortaises et colle

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